Les mouvements politiques et religieux roumains

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408Les mouvements politiques et religieux roumains
L’expansion du catholicisme s’exprima en Transylvanie d’une manière toute particulière en imposant l’union pour ramener les orthodoxes au sein de l’Eglise catholique. Les antécédents de cette opération remontent à la fin du XVIIe siècle. Les débuts ayant été marqués par un succès spectaculaire, l’on vit par la suite ses effets considérablement diminuer en conséquence de la guerre de Rákóczi. Si bien que, pendant le demi-siècle qui suivit 1711, il était presque impossible, en Transylvanie, de faire la distinction entre Roumains orthodoxes et uniates, les uns et les autres pratiquant uniformément le rite grec. Bien qu’il n’y eût que la seule Eglise grecque unie qui fût légale, le gouvernement n’en était pas moins contraint de tolérer un noyau orthodoxe à Brassó. De plus, l’Eglise orthodoxe de Transylvanie, privée de son organisation épiscopale autonome, trouvait protection au-delà des frontières, auprès de l’archevêque orthodoxe de Karlowitz, puis de l’Empire russe ainsi que des Eglises des deux Principautés roumaines. Les uniates, eux, bénéficiaient des avantages substantiels accordés par l’Etat: la possibilité d’assurer à leurs prêtres une formation nettement supérieure à celle des orthodoxes et de développer une intelligentsia plus instruite grâce, notamment, à la possibilité de s’inscrire au collège transylvain des jésuites ou à l’université de Nagyszombat, ou encore de faire des études à Vienne ou dans le Collegium de Propagande Fide à Rome.
En outre, l’Eglise uniate se vit dotée par le gouvernement impérial de rangs qui avaient un certain poids politique: ses évêques Ioan Pataki et Inochentie Micu-Klein obtinrent le titre de baron, le second put même, par faveur royale, assister, à partir de 1732, à la Diète. Ce personnage d’envergure, qui fut le plus grand Roumain de la Transylvanie du XVIIIe siècle, prit ses fonctions en 1729 et commença immédiatement à déployer une activité multiple, essentiellement dans l’intérêt de son clergé et de son Eglise, c’est-à-dire théoriquement au profit de tous les Roumains de Transylvanie, puisqu’il entendait étendre son autorité même à ceux qui étaient restés fidèles à la religion orthodoxe. Ses arguments avaient pour base juridique le second Diplôme Léopoldien du 19 mars 1701, qui exemptait les prêtres uniates de tous les services féodaux et déclarait que leurs fidèles laïcs, y compris ceux de basse condition (plebeae conditionis homines): appartenaient aux Ordres catholiques et étaient fils de la «nation», à condition d’accepter l’union. Sa persévérance finit par porter ses fruits: en décembre 1732, le souverain chargea une commission d’examiner ses doléances. En 1733, on fit même la lecture des requêtes de Micu-Klein devant la Diète. Mais les Ordres exprimèrent leurs doutes (d’ailleurs justifiés) à l’égard de la stabilité de l’union, et demandèrent à l’évêque de présenter le cathéchisme et le crédo de son Eglise. On les trouva conformes aux dogmes, mais on jugea cependant nécessaire de recenser le clergé roumain et ses fidèles.
Ainsi, en 1735, à travers les actions de Micu-Klein, les Roumains de Transylvanie entrèrent pour la première fois sur la scène politique. Se référant aux résultats du recensement de 1733, l’évêque avança que les Roumains, qui étaient en Transylvanie plus nombreux que toute autre «nation» et auxquels le second Diplôme Léopoldien garantissait le droit d’accéder à n’importe quelle charge publique, se trouvaient cependant fort désavantagés par rapport aux calvinistes et aux luthériens. (Suivant une tactique bien claire, l’évêque se tut sur le fait que les catholiques, eux, étaient nettement majoritaires dans ces fonctions.) On ne saurait affirmer, dit-il très justement, qu’il n’y ait point, parmi les Roumains, d’hommes instruits, de condition noble et aptes aux 409fonctions. Il exprima donc son désir que le roi le nommât au poste vacant d’un des conseillers du Gubernium. Mais le Ministerialkonferenz n’y étant pas favorable, il ne fut pas donné suite à sa demande. Quoi qu’il en soit, son action n’est sûrement pas étrangère au fait que Petru Dobra, le premier Roumain à faire une importante carrière politique dans la période postérieure à 1711, devint, en 1736, fiscalis director de Transylvanie.
C’était également en 1735, et toujours grâce à l’activité de Micu-Klein que l’on formula pour la première fois la théorie de la continuité daco-roumaine, ou plus exactement romaine. «Nous sommes les plus anciens habitants de la Transylvanie, qui vivons ici depuis l’Empereur Trajan», écrit-il dans son mémoire à la Cour. En fait, le moment est décisif. Trois facteurs nécessaires à la naissance de la nation roumaine en tant qu’entité politique sont réunis en Transylvanie: l’Eglise uniate en tant que cadre institutionnel s’étendant à tous les Roumains (au besoin en usant de la contrainte); une théorie historique permettant de se créer une identité nationale, et enfin, l’ambition d’accéder à des charges publiques, cette dernière servant de motivation personnelle.
Micu-Klein ne cesse de revendiquer, devant les Diètes consécutives, du printemps de 1736 à 1738, le droit à la dîme pour son clergé. En vain. Et quand, à l’automne de 1737, il en vint à faire une déclaration en son nom et en celui de toute la nation valaque de Transylvanie, les Ordres protestent contre la formulation. Mais ce combattant solitaire, à l’avant-poste du mouvement d’émancipation nationale, ne dépose pas les armes. En août 1742, il présente sa nouvelle requête à Vienne: il y réclame déjà avec insistance et de manière tout à fait explicite l’admission des Roumains comme quatrième partenaire du système des trois «nations». Et comme il eût été pratiquement impossible de définir une séparation territoriale au profit de cette quatrième «nation», la population roumaine vivant dans les comitats hongrois ou sur les territoires sicules ou saxons rejoindrait, dans sa conception, les organisations respectives de ces territoires. Un élément nouveau dans les revendications de Micu-Klein, et qui témoigne lui aussi de son génie politique: il insiste sur la nécessité de tempérer les obligations frappant les paysans et de réduire leur corvée à deux journées hebdomadaires. Cela va plus loin que les paroles du «pâtre» défendant ses ouailles. C’est en effet pour la première fois qu’apparaît ici une position d’amalgame, fondée à la fois sur des revendications nationales et paysannes, et qui sera un élément caractéristique constant de l’ensemble du mouvement national roumain de Transylvanie. Cette même idée donnera plus tard naissance à la formule antithétique «seigneur terrien hongrois – serf roumain». Or, si la proportion des Roumains parmi les serfs est effectivement plus élevée que leur proportion dans l’ensemble de la population transylvaine, le rapport entre serfs et non-serfs compté pour toute la population roumaine dans le pays entier (y compris les paysans libres de Königsboden) correspond à peu près au pourcentage national.
Mais, peu après, le mouvement national roumain disparaîtra pour longtemps de la scène politique. A l’issue d’âpres luttes, en 1744, on procède enfin à la codification de l’existence et des biens de l’évéché catholique grec de Transylvanie. Ainsi, le problème roumain, en tant que question politique, semblait classé avec celui des uniates.
Au printemps de 1744, cependant, un moine orthodoxe serbe nommé Visarion Sarai, qui ne savait même pas le roumain, arriva en Transylvanie du Banat. Là où passe le moine pieux, prêchant avec une grande force suggestive, bien que nécessitant la traduction, l’union se dissout immédiatement, à travers toute la Transylvanie du Sud. Le long de son chemin vers Szeben, les Roumains 410uniates chassent leurs prêtres, qui seront immédiatement remplacés par des popes orthodoxes. Arrêté, Visarion est conduit à Vienne où il disparaît définitivement, mais son action fournit un excellent atout à ceux qui arguent du caractère éphémère de l’union. Par ailleurs, la noblesse calviniste était, à plus d’un endroit, nettement favorable à la religion orthodoxe. D’une part pour vivre en paix avec ses serfs, d’autre part guidée par l’idée de la tolérance qui, face à l’oppression catholique, se renforçait. Micu-Klein affirma se charger de neutraliser le mouvement par la méthode douce à condition qu’on donne satisfaction à ses exigences de longue date. Mais il n’en devient que plus suspect tant aux yeux des Ordres, que pour le commandement général et le gouvernement central, qui n’avait plus besoin de lui. En juin 1744, il est convoqué à Vienne. L’évêque répond par une dernière manœuvre politique pleine d’audace: il réunit un synode à Balázsfalva, auquel prennent part, outre le clergé, des laïcs roumains (nobles et serfs), et même des orthodoxes. C’est déjà un vrai rassemblement national, l’unique à avoir existé avant 1848.
Sa composition elle-même est bien en avance sur son époque, et plus encore la question posée par l’évêque: étant donné que les Diplômes Léopoldiens, dont on demande la confirmation et qui servent de fondement juridique à un programme, évoquent eux aussi le peuple, ne doit-on pas demander à ce même peuple s’il est prêt à soutenir leur lutte et si oui, sous quelle forme? C’est là une allusion directe à un plébiscite, une «assemblée populaire», à la fois évoquant le passé et annonçant l’avenir. Mais personne n’ose suivre aussi loin le plus grand Roumain de son siècle. Bien que le synode approuve théoriquement la participation du peuple, il s’oppose, dans la situation donnée, à l’impliquer directement dans les pourparlers. Cet homme qui était à la pointe de ses troupes, est allé trop de l’avant, sur un terrain où mêmes les plus braves refusaient de se risquer.
Micu-Klein aurait dû affronter, à Vienne, à l’automne de 1744, une enquête qui ne pouvait avoir d’autre résultat que sa mort politique. Il préféra s’enfuir à Rome, où il mourut en exil, en vieillard solitaire. Ses successeurs, sans toutefois renoncer aux revendications nationales, furent plus prudents dans leur formulation. Prenant pour modèle, l’exemple de l’Eglise catholique, ils firent progressivement de Balázsfalva un important centre spirituel. Pour raffermir leur position, ils s’efforcèrent, parallèlement à des efforts de relèvement culturel, de refouler autant que possible la religion orthodoxe.
A cette époque, les orthodoxes cherchent déjà appui surtout auprès de la Russie, d’autant que l’alliance austro-russe de 1744 est devenue un des principaux piliers de la politique extérieure de l’Empire. La première personnalité roumaine à se rendre en Russie, en 1740, pour y accomplir une mission politique est Nicolae Pop, ancien archidiacre uniate. Il obtient que la Tzarine Elisabeth donne l’instruction à son ambassadeur de Vienne de se renseigner sur les griefs du clergé et des paysans roumains, et d’intervenir au besoin, dans leur intérêt, à la cour des Habsbourg. La religion orthodoxe bénéficie également du soutien de la Valachie ainsi que de l’Eglise orthodoxe serbe de Hongrie. Et quand l’Empire des Habsbourg, engagé dans la guerre de Sept ans, a particulièrement besoin de son allié russe, mais aussi d’avoir une Transylvanie calme et pacifiée, il se résigne à abandonner, du moins en partie, le projet d’union confessionnelle.
En été 1758, Vienne prend la décision de nommer en Transylvanie un évêque orthodoxe qui ne dépendra pas de l’archevêque de Karlowitz et, un an plus tard, on publie l’édit de tolérance dit «orthodoxe» dans lequel, cependant, la nomination de l’évêque reste à l’état de promesse. Là-dessus, des masses 411populaires quittent en vagues successives la religion uniate; à la tête de leur mouvement, on trouve un moine nommé Sofronie (Stan Popovici) que les autorités ne parviennent pas à mettre au pas. Le gouvernement dépêche immédiatement en Transylvanie le nouvel évêque (Dionisie Novacovici), ancien évêque de Buda, et il donne parallèlement consigne au commandantgénéral Buccow de séparer les communautés et les biens ecclésiastiques uniates et orthodoxes. Le résultat en est qu’on recense 25 144 chefs de famille uniates et 126 652 orthodoxes.
Tout en sauvant l’organisation et les bases matérielles de l’Eglise uniate, le gouvernement reconnaît la légalité de l’Eglise orthodoxe de Transylvanie sans pour autant lui accorder davantage que le statut de religion tolérée.

 

 

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